Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/260

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se jugeait pas en péril ! Elle se croyait même en mesure de dicter des conditions ! N’était-il pas bien imprudent de braver un pouvoir aussi sûr de lui-même ? Des exclamations, parties de tous les coins de la salle, témoignèrent de l’effroi de l’assemblée. D’un autre côté, la persistance des Parisiens dans la révolte, les cris de mort poussés dans la cour même de l’hôtel ; l’ardeur bruyante des citoyens qui se pressaient aux portes, le bruit lointain des cloches mêlé aux détonations de la mousqueterie et aux roulements des tambours, tout cela prouvait que ce n’était pas à Saint-Cloud seulement qu’était la force, et que, comme la royauté, le peuple avait ses passions. Quel parti prendre ? Celui du courage, disaient M. Bérard et quelques-uns de ses amis. Deux journalistes, MM. Andra et Barbaroux s’étaient précipités dans la salle, et ils étaient là, taisant honte aux députés de leur faiblesse, les adjurant de se mettre à la tête des insurgés et de ne pas laisser sans chefs une population armée pour la querelle de la bourgeoisie. M. Coste apportait en même temps une épreuve de la protestation que nous avons rapportée et qu’il avait été chargé d’imprimer ; mais, non content de l’avoir purgée de toute expression monarchique, il refusait de la publier, à moins que les députés n’y apposassent leurs signatures. Il fallait se décider. M. Sébastiani eût peur, et sortit, accompagné de M. Bertin de Vaux et du général Gérard. Peu à peu l’assemblée se trouva réduite à un fort petit nombre de membres. Pour échapper au danger des signatures réelles, on imagina de faire une liste de noms c’était laisser à chacun la ressource d’un désaveu ; et,