Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/82

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sceaux à la chambre, y est accueilli par de nombreux murmures ; il n’est adopté qu’après des modifications qui le dénaturent d’une manière complète. Consécration éclatante de l’initiative de l’assemblée ! Et, à dater de ce moment, avec quelle ardeur cette initiative ne cherche-t-elle pas l’occasion de s’exercer ! Qu’il s’agisse de la loi sur la suspension de la liberté individuelle, présentée par M. Decazes, ou de celle présentée sur les juridictions prévôtales par le duc de Feltre, la chambre ne se croit pas appelée seulement à rectifier le travail des ministres, mais à le refaire. Seule, elle occupe la scène politique ; seule, elle gouverne. Depuis la Convention, vit-on assemblée plus violente, plus impérieuse ; plus enivrée du sentiment de son droit ? Elle apprend que le roi veut faire légaliser l’ordonnance du 24 juillet qui bornait les vengeances royalistes à dix-neuf têtes marquantes abandonnées aux tribunaux, et à trente-huit personnes frappées de bannissement. À cette nouvelle, sa fureur est au comble, et pour que la loi d’amnistie ne soit pas trop indulgente, c’est elle-même qui s’empare de l’initiative, usurpant ainsi la plus personnelle de toutes les prérogatives de la royauté ! Qu’imaginer de plus hautain ? Et quel acte de souveraineté plus péremptoire que ce projet de M. de Labourdonnaye, qui proscrivait du même coup tous le maréchaux, tous les généraux, tous les préfets, tous les hauts fonctionnaires, complices du retour de Bonaparte ; qui