Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/263

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l’époque dont il s’agit, elle était dominée par un étroit esprit de corporation. Avant tout, elle tenait à conserver sa physionomie industrielle, son originalité, et ce qui lui faisait, dans la classe ouvrière, une situation à part. Nul doute qu’il n’y eût dans son sein des hommes élevés au-dessus des intérêts de corps par la force de leur intelligence et la générosité de leurs désirs ; mais ces hommes ne constituaient pas la majorité, dont on aurait pu résumer ainsi les espérances : augmentation du salaire des ouvriers en soie. C’était tout simple, hélas ! Qui s’était chargé d’instruire cette partie du peuple, de lui donner des notions de morale, de la nourrir des préceptes de la charité, de lui enseigner les immortels rudiments de l’évangile ? Et, d’un autre côté, comment se serait-elle livrée avec une entière confiance à une association politique dans laquelle à des citoyens intelligents et courageux se trouvaient mêlés tant d’ambitieux impatients, de démagogues pleins d’ignorance, de gens sans aveu et d’agitateurs sans but ? A Lyon, d’ailleurs, l’influence du clergé sur une portion de la classe des ouvriers en soie avait toujours été assez grande. Or, voici dans quel sens était dirigée cette influence, qui s’exerçait sourdement et à petit bruit par les femmes. Ne voyant dans les fabricants que des libéraux et des sceptiques, le clergé n’avait eu garde d’attiédir le sentiment. de révolte qui armait contre eux les ouvriers mais en même temps il poussait ceux-ci à se défier du parti républicain tout en profitant de ses sympathies. Et c’était bien là en effet, à l’égard de la Société des Droits de l’Homme, l’attitude des meneurs