Page:Blanc - L’Organisation du travail.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
12
INTRODUCTION.

N’acceptons pas aveuglément tout ce que des esprits légers nous donneraient comme autant d’oracles ; et cherchons la vérité avec lenteur, avec prudence, avec défiance même ; rien de mieux. Mais pourquoi fermerions-nous carrière aux témérités de l’esprit ? À une armée qui s’avance en pays inconnu, il faut des éclaireurs, dussent quelques-uns d’entre eux s’égarer. Ah ! l’intrépidité de la pensée n’est pas aujourd’hui chose si commune, qu’on doive glacer les intelligences en travail et décourager l’audace.

Que craignez-vous ? Qu’on jette dans les esprits des notions fausses sur la condition du prolétaire et les moyens de l’améliorer ? Si ces notions sont fausses, la discussion les emportera, comme le vent emporte la paille mêlée au grain.

Que craignez-vous encore ? Que la hardiesse de certaines solutions données aux questions sociales ne porte le trouble dans les cœurs et ne nuise au succès de la réforme politique ? Mais d’abord, est-ce que les questions de suffrage universel, de souveraineté réelle du peuple, n’effraient personne en France ? Et que faire là, sinon montrer par de vives raisons la puérilité et le vide de ces frayeurs ? Mais quoi ! ce qui effraie le plus dans les partis, ce n’est pas ce qu’ils disent, c’est ce qu’ils négligent ou refusent de dire. L’inconnu ! voilà ce qui épouvante surtout les âmes faibles. Le parti démocratique sera-t-il accusé de pousser à une Jacquerie industrielle, quand il aura scientifiquement développé les moyens de tirer l’industrie du désordre effroyable où elle s’égare ? S’armera-t-on contre lui des répugnances aveugles de la bourgeoisie, quand il aura prouvé que la concentration toujours crois-