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ORGANISATION

même raison, le bon marché conduit à l’exagération des prix. Ainsi, ce qui a été une arme de guerre parmi les producteurs, devient tôt ou tard pour les consommateurs eux-mêmes une cause de pauvreté. Que si à cette cause on ajoute toutes celles que nous avons déjà énumérées, et en première ligne l’accroissement désordonné de la population, il faudra bien reconnaître comme un fait né directement de la concurrence, l’appauvrissement de la masse des consommateurs.

Mais, d’un autre côté, cette concurrence, qui tend à tarir les sources de la consommation, pousse la production à une activité dévorante. La confusion produite par l’antagonisme universel dérobe à chaque producteur la connaissance du marché. Il faut qu’il compte sur le hasard pour l’écoulement de ses produits, qu’il enfante dans les ténèbres. Pourquoi se modérerait-il, surtout lorsqu’il lui est permis de rejeter ses pertes sur le salaire si éminemment élastique de l’ouvrier ? Il n’est pas jusqu’à ceux qui produisent à perte qui ne continuent à produire, parce qu’ils ne veulent pas laisser périr la valeur de leurs machines, de leurs outils, de leurs matières premières, de leurs constructions, de ce qui leur reste encore de clientèle, et parce que l’industrie, sous l’empire du principe de concurrence, n’étant plus qu’un jeu de hasard, le joueur ne veut pas renoncer au bénéfice possible de quelque heureux coup de dé.