Page:Blanqui - Cours d’économie industrielle 1837-1838.djvu/77

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développement l’intelligence peut-elle acquérir si le même ouvrier n’a, pendant plusieurs années, que le temps de faire des clous ou d’émoudre des pointes d’épingles ? Oui, Messieurs, ces occupations sont loin d’agrandir le cercle des connaissances scientifiques et littéraires de ceux qui en sont chargés, et l’homme condamné à faire des clous toute sa vie devient clou lui-même, si je puis m’exprimer ainsi ; et cependant Dieu n’a pas créé l’homme pour de si rudes occupations ! — Sans doute il faut que de temps en temps il lève les yeux vers le ciel pour y lire l’empreinte de la divinité. Mais le mal porte avec lui sa guérison, et la civilisation le fera disparaître un jour par la division du travail elle-même mieux entendue et mieux appliquée. Le mouvement n’est pas permanent, et si aujourd’hui la division du travail, encore incomplète, force l’homme à faire un travail stupide et le réduit aux fonctions de machine, elle lui fera trouver plus tard un salaire honorable avec un repos convenable, tout en le dispensant d’une foule de travaux écrasants qui le rendent aujourd’hui roue, volant ou bête de somme.

Vous connaissez tous quel horrible métier c’est que de tirer des épreuves ; il faut être constamment pendu à la mécanique. Eh ! bien, si vous avez un balancier qui fasse cette besogne, l’homme n’est plus abîmé par le travail. Cependant, Messieurs, pour le dire en passant, les premiers ouvriers qui ont dû se servir de cette machine, se sont révoltés contre la nouvelle puissance qui venait relever la