Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/253

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J’estime, moi, que le châtiment a été mou : il fallait raser le village, tuer les femmes et les enfants. Notre devoir est d’en finir avec les francs-tireurs. Je ne nie pas que cela soit horrible. Mais que voulez-vous ? C’est la guerre.

Puis, sans transition, le capitaine demanda des nouvelles de sa mère Helena, de sa tante Luisa, de Chichi, de son cousin Jules, et il se félicita d’apprendre qu’ils étaient en sûreté dans le midi de la France. Ensuite, croyant sans doute que Marcel attendait avec impatience des nouvelles de la parenté germanique, il se mit à parler de sa propre famille.

Tous les Hartrott étaient dans une magnifique situation. Son illustre père, à qui l’âge ne permettait plus de faire campagne, était président de plusieurs sociétés patriotiques, ce qui ne l’empêchait pas d’organiser aussi de futures entreprises industrielles pour exploiter les pays conquis. Son frère le savant faisait sur les buts de la guerre des conférences où il déterminait théoriquement les pays que devrait s’annexer l’empire victorieux, tonnait contre les mauvais patriotes qui se montraient faibles et mesquins dans leurs prétentions. Ses deux sœurs, un peu attristées par l’absence de leurs fiancés, lieutenants de hussards, visitaient les hôpitaux et demandaient à Dieu le châtiment de la perfide Angleterre.

Tout en causant, le capitaine ramenait son oncle vers le château. Les soldats, qui jusqu’alors avaient