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le Moyen Âge. Un grand poète qui ne chantait que pour Jésus-Christ, comme les saints inconnus par qui furent écrites les décourageantes hymnes de la liturgie !

Ah ! c’est vrai qu’on avait eu d’autres lyres soi-disant chrétiennes. Le « mélodieux » Lamartine avait soupiré le nom de Jéhovah dans les ramures de la provisoire forêt romantique et l’effrayant Tétragramme n’avait servi qu’à rendre plus anonyme la face de brumes du Dieu sans Plaies ni Eucharistie toléré par les philosophes. Le grand Hugo et le petit Musset n’avaient pas, sans doute, paru mériter qu’on les cataloguât sous la même rubrique ; pourtant, ils avaient parlé, eux aussi, d’un Très-Haut quelconque, à de certains jours, et ce n’était pas un Dieu jaloux, vous pouvez m’en croire. Il était sans inconvénient d’adorer n’importe quoi dans le même temps qu’on le thuriférait de rimes conjugales et de célibataires hémistiches.

Baudelaire seul fut incontestablement catholique au plus profond de sa pensée. Mais il fut catholique à rebours, à la manière des démons qui « croient et tremblent » suivant la parole de saint Jacques. Les Fleurs du mal et les Poèmes en prose paraissent, à de certaines places, calcinés, comme des autels maudits que des langues d’enfer auraient pourléchés.

Ce poète gorgonien, devant l’amertume de qui les plus noires tristesses ont l’air de mirlitonner, parla constamment la grammaire du catho-