Page:Bloy - Exégèse des Lieux Communs, Mercure de France, 1902.djvu/275

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est quelque chose comme le Brummel de son trou. Les jeunes Danois, entr’ouverts sur son passage, sont attentifs aux gestes et aux paroles de cet Arbiter elegantiarum.

« Il n’est pas bon que l’homme soit seul, dit le Seigneur Dieu. Faisons-lui une aide semblable à lui. » Je n’étonnerai personne en ajoutant à ce qui précède qu’une Mme Kanaris-Petersen existe et qu’elle est digne de son époux. On ne connaît pas de vainqueur palicare ni moldo-valaque dans l’ascendance de cette dame, où prédominent seulement la quincaillerie et les fers en gros. Mais elle apporta, dit-on, de l’argent et passe pour avoir été une ravissante personne. Il faut le savoir. Elle m’a paru plutôt briquetée et verjuteuse, ce qui vient sans doute en aide aux grands airs dans ce culot de province.

Un fait incontestable, c’est qu’on s’amuse fort chez les Kanaris. Comédie et bal travesti huit ou dix mois de l’année, Mme Kanaris ayant acquis le renom d’une délicieuse cabotine, et la chie-en-lit étant considérée, en général, dans un tel faubourg Saint-Germain de la Béotie danoise, comme l’expression dernière de la finesse et de l’atticisme.

Au milieu de cette crotte grandissent deux petites filles que l’infanticide frivolité de leur mère habille et déshabille dix fois le jour. Que deviendront-elles ? Il est trop facile de le prévoir. Le monde luthérien, c’est l’empire de Satan bâtard.