Page:Boccace - Décaméron.djvu/117

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firent un joyeux accueil ; puis Conrad les introduisit au banquet qui n’était pas encore à moitié achevé. Là, la dame et Giusfredi, et tous les autres, leur témoignèrent une telle joie, que jamais on n’en vit de pareille. Quant à eux, avant de se mettre à manger, ils saluèrent Conrad et sa femme de la part d’Arrighetto, et les remercièrent du mieux qu’ils surent et qu’ils purent de l’honneur fait à la femme et au fils d’Arrighetto, mettant ce dernier à leur disposition pour tout ce qui dépendrait de lui. S’étant ensuite tournés vers messire Guasparrino, dont le service était inattendu, ils lui dirent qu’ils étaient certains que, lorsque Arrighetto saurait ce qu’il avait fait pour le Chassé, il lui rendrait de semblables grâces et plus grandes encore. Après quoi ils prirent part à la fête et mangèrent joyeusement en compagnie des deux nouvelles épousées et des deux nouveaux époux. Conrad fêta son gendre et ses autres parents et amis, non-seulement ce jour-là, mais pendant un bon nombre d’autres. Quand la fête fut un peu calmée, il parut temps à madame Beritola, à Giusfredi et aux autres de partir, et, au milieu des pleurs de Conrad, de sa dame et de messer Guasparrino, ils montèrent sur la frégate, emmenant la Spina. Poussés par un vent prospère, ils arrivèrent promptement en Sicile, où tous, les fils et les femmes, furent reçus à Palerme par Arrighetto, avec une telle fête que jamais on ne pourrait le dire. On croit qu’ils y vécurent tous longtemps et très heureux, et, en gens reconnaissants des bienfaits reçus, très amis de messire Dieu. — »



NOUVELLE VII.

Le Soudan de Babylonie envoie sa fille en mariage au roi de Garbe. Celle-ci, par suite de nombreux accidents, tombe dans l’espace de quatre années aux mains de neuf hommes qui l’emmènent en divers pays. En dernier lieu, rendue à son père comme pucelle, elle est de nouveau envoyée au roi de Garbe.


Si la nouvelle d’Émilia avait duré quelques instants de plus, il est probable que la compassion que les jeunes dames éprouvèrent pour les malheurs de madame Beritola, leur aurait arraché des larmes. Mais quand la nouvelle fut finie, il plut à la reine que Pamphile continuât en contant la sienne ; pour quoi, Pamphile qui était le plus obéissant des hommes, commença : « — Plaisantes dames, il est malaisé de connaître ce qui nous convient. C’est ainsi qu’on a pu voir bien