Page:Boileau - Œuvres poétiques, édition 1872.djvu/81

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de Fondi, dont étoit préteur un certain Anfidius Luscus ; mais ce ne fut pas sans avoir bien ri de la folie de ce préteur, auparavant commis, qui faisoit le sénateur et l’homme de qualité. »

Peut-on désigner un homme plus précisément ? et les circonstances seules ne suffisoient-elles pas pour le faire reconnoitre ? On me dira peut-être qu’Aufidius étoit mort alors ; mais Horace parle là d’un voyage fait depuis peu. Et puis, comment mes censeurs répondront-ils à cet autre passage ?

Turgidus Alpinus jugulat dum Memnona, dunque
Diffingit Rheni luteum caput, hæc ego Indo.

« Pendant, dit Horace, que ce poëte enflé d’Alpinus égorge Memnon dans son poëme, et s’embourbe dans la description du Rhin, je me joue en ces satires. »

Alpinus vivoit donc du temps qu’Horace se jouoit en ses satires ; et si Alpinus en cet endroit est un nom supposé, l’auteur du poëme de Memnon pouvoit-il s’y méconnoitre ? Horace, dira-t-on, vivoit sous le règne du plus poli de tous les empereurs ; mais vivons-nous sous un règne moins poli ? et veut-on qu’un prince qui a tant de qualités communes avec Auguste soit moins dégoûté que lui des méchans livres, et plus rigoureux envers ceux qui les blâment ?

Examinons pourtant Perse, qui écrivoit sous le règne de Néron. Il ne raille pas simplement les ouvrages des poëtes de son temps, il attaque les vers de Néron même. Car enfin tout le monde sait, et toute