Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/124

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entendre. Et je ne connais personne au théâtre.

— Ni moi non plus, hélas !

— Je vous crois, mais j’avais pensé que, par vos relations, je pourrais arriver jusqu’à un directeur… d’une scène lyrique quelconque. Ainsi le colonel Mornac les connaît tous… il me l’a dit ; j’aurais pu m’adresser directement à lui. Je n’ai pas osé. Me reprocherez-vous d’avoir pensé que vous consentiriez à me servir d’intermédiaire auprès de lui ?

— Non, mademoiselle, répondit assez froidement Robert. Je ferai ce que vous me demandez. J’espère même que le colonel se prêtera à votre désir et j’admets que vous réussissiez au théâtre. Mais après ? Quelle sera votre existence ?… Savez-vous comment vivent les actrices ?… Croyez-vous qu’elles se contentent de leurs appointements… quand elles en ont ?

— Je m’en contenterais, moi. J’ ai bien su économiser les trois quarts de ceux que me donnait Mme de Malvoisine.

— Vous oubliez que chez elle vous étiez défrayée de tout. Au théâtre, on exigera de vous des toilettes qui absorberont et au-delà l’argent que vous gagnerez… en admettant que vous en gagniez. Me direz-vous que vous vous marierez ?… Épouseriez-vous un acteur ?

— Non, murmura la jeune fille.

— Espérez-vous qu’un homme du monde, admirateur de votre talent, vous demandera votre main ?

— Encore moins, dit tristement Violette.

— Sur qui comptez-vous donc ?

— Sur personne, répondit-elle en pleurant.