Page:Boisgobey - Rubis sur l'ongle, 1886.djvu/74

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sés, grand, sec et d’un aspect sévère. Rasé de près et vêtu de noir, il avait l’air d’un magistrat et ses employés le redoutaient beaucoup.

Robert qu’il avait toujours traité avec une bonté exceptionnelle, s’étonna d’être accueilli de la sorte, mais il prit un siège et il attendit, tenant à la main le paquet de billets de banque.

M. Labitte acheva sa lettre, la mit sous enveloppe, écrivit l’adresse et, après avoir posé le pli sur la table, dit à son secrétaire :

— Alors, vous avez la somme ?

— La voici, monsieur.

— Où vous l’êtes-vous procurée ?

— Que voulez-vous dire ? balbutia Robert.

— Évidemment, vous ne l’aviez plus, quand vous m’avez écrit, il y a deux heures, pour me demander la permission de ne pas venir aujourd’hui. À qui l’avez-vous empruntée ?

Robert, très pâle, allait protester.

— Épargnez-vous un mensonge, lui dit froidement M. Labitte. Je sais que, cette nuit, vous avez perdu au jeu l’argent que je vous avais confié. Je sais même où et contre qui vous l’avez perdu.

— Qui vous l’a dit ? demanda vivement Bécherel.

— Peu importe. Je le sais et vous ne pouvez pas le nier.

— Pardon, monsieur… j’ai perdu, c’est vrai… et les billets de banque que j’ai perdus étaient à vous, c’est encore vrai. Mais j’avais à moi… chez moi… les dix mille francs… et même davantage. Je n’exposais donc que mon argent, puisque j’étais en mesure de vous les rendre ce matin.