Page:Boissier - Cicéron et ses amis.djvu/264

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trouvez là-bas ni or ni argent, mon avis est que vous enleviez quelqu’un de ces chariots bretons, et que vous nous arriviez à Rome sans débrider[1]. » Quintus était assez de cette opinion. Quoiqu’il eût été bien accueilli de César, qui l’avait nommé son lieutenant, quand il vit que la fortune n’arrivait pas aussi vite qu’il l’avait espéré, il perdit courage, et, comme Trébatius, il eut un moment la pensée de revenir ; mais Cicéron, qui cette fois ne plaisantait plus, l’en empêcha. :

Il lui rendit un très grand service, car c’est précisément pendant l’hiver qui suivit la guerre de Bretagne que Quintus eut l’occasion d’accomplir l’action héroïque qui recommande son nom à l’estime des gens de guerre. Quoiqu’il lût Sophocle avec passion et qu’il eût fait des tragédies, ce n’était au fond qu’un soldat. En présence de l’ennemi, il se retrouva lui-même et déploya une énergie qu’on ne lui soupçonnait pas. Au milieu de populations révoltées dans des retranchements élevés à la hâte et en une nuit, il sut, avec une seule légion, défendre le camp dont César lui avait confié la garde et tenir tête à des ennemis innombrables qui venaient de détruire une armée romaine. Il répondit par un ferme langage à leurs bravades insolentes. Bien qu’il fût malade, il déploya une incroyable activité, et il fallut une sédition de ses soldats pour le forcer à se ménager. Je n’ai pas à revenir sur les détails de cette affaire que César a si bien racontée dans ses Commentaires, et qui est une des plus glorieuses de la guerre des Gaules. Ce beau fait d’armes relève Quintus ; il efface les petitesses de son caractère et l’aide à soutenir avec un peu plus d’honneur le rôle ingrat et difficile de frère cadet d’un grand homme.

  1. Ad fam., VII, 7.