Page:Boissier - L’Académie française sous l’ancien régime, 1909.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
52
l’académie française sous l’ancien régime.

netteté dont il est capable, et que cela conduit insensiblement à y mettre de l’esprit ». Ce qu’il disait, il a voulu le faire. Le souci d’affiner et d’animer le style est visible chez lui presque à chaque page. On a eu raison de dire que ce dernier représentant du xviie siècle prévoit et annonce le xviiie et qu’il a voulu lui préparer l’instrument dont il s’est servi pour ses luttes. Et pourtant, tout ami qu’il était de la nouveauté et du progrès, il s’est rangé résolument dans le parti des anciens ; il faisait campagne à côté de Boileau contre Perrault et ses amis. C’est lui qui a comparé ceux qui, nourris de l’antiquité, s’élèvent contre elle et la maltraitent « à ces enfants drus et forts d’un bon lait qu’ils ont sucé, qui battent leur nourrice ».

On comprend qu’un homme qui avait pris une attitude si décidée dans des luttes qui passionnaient tout le monde, et qui s’était fait tant d’ennemis, ne soit pas arrivé sans peine à l’Académie. Il s’y présenta d’abord sans succès, et peut-être plusieurs fois de suite[1] ; enfin, en 1693,

  1. On pourra voir en détail l’histoire des candidatures de La Bruyère dans l’excellente notice que M. Servois a mise en tête de ses œuvres dans la Collection des grands écrivains de la France.