Page:Bonnerot - Romain Rolland sa vie son oeuvre.djvu/86

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l’auteur de Jean-Christophe sans rendre officielle sa décision ; plusieurs journaux l’avaient même annoncé par avance. Aussi quand la nouvelle fut confirmée à la fin de 1916, passa-t-elle presque inaperçue, et c’est à peine si quelques chroniqueurs la commentèrent. Dès que R. Rolland en eut connaissance, il écrivit à son éditeur, M. Humblot, pour lui dire que son intention était de « remettre la totalité du prix à diverses œuvres de bienfaisance, » ne demandant pour lui « que le droit de penser librement. » (Demain [Revue suisse], 1re année, nos 11-12, novembre-décembre 1916, p. 391-392).

On a dit que le Prix Nobel, consécration de toute une œuvre, couronnement d’une carrière, était attribué surtout à l’auteur de Au-dessus de la Mêlée et que les Suédois étaient germanophiles. La méchanceté ici se double d’une inexactitude. L’œuvre de R. Rolland est admirée à l’étranger, plus qu’aucune autre de nos écrivains contemporains, et j’en veux comme preuve le grand nombre de traductions dont elles ont été l’objet. Jean-Christophe et la Vie de Beethoven sont connus et lus dans toutes les parties du monde : éditions anglaises, américaines, allemandes, espagnoles, polonaises, russes, suédoises, italiennes, hollandaises, danoises, les ont répandus à des milliers d’exemplaires. Rapprochant R. Rolland de Maeterlinck et recherchant les raisons de leur grand succès à l’étranger, M. Albert Thibaudet a montré[1] qu’ils appartiennent tous deux « à ce qu’on pourrait appeler la littérature de liaison, » et qu’ils font « partie

  1. Cf. Bibliographie n° 200.