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INTRODUCTION


Il y a quelques mois, la ville de Lunel, où Henri de Bornier était né le 24 décembre 1825, élevait un monument à l’illustre poète. On en souhaitait un autre : une édition où seraient réunis pour la première fois les ouvrages sur lesquels sa haute réputation s’était fondée. Nous la présentons aujourd’hui au public.

Devions-nous y faire entrer toute l’œuvre ? Nous ne l’avons pas cru ; c’est mal servir la gloire d’un écrivain que de vouloir, après sa mort, imposer aux lecteurs des productions auxquelles il n’attachait lui-même qu’une médiocre importance. Henri de Bornier n’était point de ceux qui méconnaissent leur vocation véritable et semblent ignorer leurs limites. « Je ne suis pas un poète lyrique », répétait-il souvent ; il voulait dire par là que ses poèmes les plus divers prenaient presque toujours, comme malgré lui, un accent qui n’était point celui du pur lyrisme. En effet, outre que les « À-propos dramatiques » où sont célébrés, non sans grandeur, Corneille, Racine, Molière, Shakespeare, Victor Hugo, occupent les deux tiers du recueil de ses Poésies Complètes, il y a, dans le reste même, toujours plus d’éloquence que de musique et plus d’action que de rêve : on y reconnaît, dès l’abord, les vers d’un homme de théâtre, faits pour passer la rampe ou pour être déclamés, en plein air, par quelque voix tragique, devant une foule assemblée.

Si, en prose, sans oublier une forte étude sur La Politique dans Corneille, il a écrit quelques romans, — Comment on devient belle, Louise de Vauvert, Le Jeu des Vertus, La Lizardière… — il ne les considérait que comme de faciles et reposantes distractions de son esprit, que comme de simples entractes entre les labeurs passionnés de ses drames. Encore