Page:Bornier - Œuvres choisies, 1913.djvu/240

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

AFRANIUS

Tout cela grandement m’embarrasse !
Paul, viens ici.

(Paul et Faustus descendent vers lui.)

Voyons, je te parle en ami ;
Mais toi, tu ne fais point les choses à demi.
Ce qu’on dit des Césars, chez soi, les portes closes,
Le crier en public, tu l’oserais, tu l’oses !
Et tu le fais devant ce maudit Elymas !
Je m’étais exilé dans ces lointains climats
Pour mieux fuir le Forum, la tribune vorace,
Pour réciter les vers de Virgile et d’Horace
En buvant à loisir le massique divin…
Grâce à toi ce beau rêve aujourd’hui sera vain :
T’épargner, ce serait pour moi fâcheuse affaire !

LYDIE et MÉGARA

Afranius…

AFRANIUS

Voici tout ce que je peux faire.

MÉGARA

Mon bon Afranius !

AFRANIUS, réfléchissant.

Après tout… pourquoi pas ?
Elymas est parti pour chercher les soldats ;
Sous prétexte que l’ordre est de forme frivole
Et qu’un Juif aux licteurs ne peut porter parole,
Je retourne à la ville, et j’y mettrai bon temps.
Mais, Paul, je ne peux rien pour toi si tu m’attends.
— Si de prendre la fuite il te venait l’envie,
Je ne blâme pas ceux qui tiennent à la vie ;
Je crois même pouvoir te donner un conseil :
Le chemin est meilleur du côté du soleil ;
Pour aller vers la mer, prends la route Égnatienne,
Mes soldats prendront l’autre. Adieu.