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montmeillan, tant s’en faut. Je fais la grimace ; alors le Gênois me donne la liste des vins fins de son pays : le grignonilo, le parolo, l’hebiolo, l’amabile, l’asti, etc. Il m’en vante la qualité, la limpidité, la couleur, le bouquet, ce qui ne me fait pas paraître meilleur celui que je bois.

Les maisons de bois sont couvertes d’énormes pierres plates, très-propres à les empêcher de s’envoler, mais qui doivent aider à les écraser quand, à leur poids, s’ajoute celui de la neige. Je remarque des fenêtres grillées, et de petites portes singeant les grandes et qui ressemblent à des gueules de fours.

L’accident est réparé, nous avons repris notre marche. Les autres voitures nous avaient attendus, ainsi le veut le règlement, chose assez prudente : dans les mauvais temps, les voyageurs, sauf les courriers, ne marchent que par convois.

Nous traversons d’autres villages ou hameaux, toujours éclairés par cette magnifique lune dont je ne cesse de remercier l’éclat qui nous laisse apercevoir la cime des montagnes et le cours des torrents formant chûte ou cascade. Dans un de ces cours d’eau, nous apercevons des lumières ; le Gênois nous dit que c’est une pêche aux flambeaux, et que l’on prend ainsi de fort belles truites.

Après une montée de cinq heures, nous sommes à la cime du Mont-Cenis. On nous annonce que la descente en demandera trois ; elle est en zigzag, et l’effet des lumières de nos voitures se fait encore mieux sentir. Notre Mantouan rit toujours des calembourgs qu’il fait ou qu’il croit faire