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UNE DE PERDUE

— Allez ; faites pour le mieux. Demain, à huit heures du soir au pied de la rue Bienville.

— Je n’y manquerai pas ; peut-être demain matin.

Pluchon, en quittant le docteur, se rendit au marché aux légumes, où il trouva la mère Coco et sa fille Clémence. L’air mystérieux de Pluchon qui parlait avec animation à la mère Coco, qu’il avait appelée à l’écart, frappa Clémence qui, presque sans le vouloir, prêta l’oreille. Plusieurs fois elle entendit les mots « cadavre, noyé, habitation des champs. » Elle tressaillit involontairement ; sa figure prit une expression de profonde tristesse, et elle sentit instinctivement que quelque crime se préparait, auquel ses frères, et peut-être sa mère, allaient prendre part. Elle n’avait pas vu ses frères à la maison depuis trois jours ; une absence aussi prolongée l’inquiétait vivement. De temps en temps elle jetait un coup d’œil furtif sur sa mère et Pluchon. Celui-ci, après avoir donné rendez-vous à la mère Coco pour six heures au couvent des Ursulines, prit la direction de la troisième municipalité en suivant la levée.

La mère Coco recommanda strictement à sa fille de retourner avant la nuit à la maison, de se coucher en arrivant et de ne pas l’attendre.

— J’ai de pressantes affaires, continua-t-elle, pour ce soir, qui me retiendront une partie de la nuit.

— Ne reviendrez-vous pas coucher à la maison, maman ? demanda Clémence d’un air timide.

— Allons, petite impertinente, pas de questions, et surtout pas de réflexions.

Clémence baissa les yeux sous le regard méchant de la vieille, et commença à faire ses préparatifs de départ. La mère Coco prit par la rue Canal, afin de