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UNE DE PERDUE

nièce. Je me contins cependant, et je lui dis en m’efforçant de donner à mes paroles un air d’indifférence, qui trahissaient mon émotion et la pâleur de mon visage.

— Oh ! non, madame ; je suis bien, mais j’étais inquiet pour mademoiselle de M***

— Vous lui portez donc un grand intérêt ? me dit-elle, en approchant sa chaise de la mienne.

« Je levai mes yeux sur sa figure, et je surpris ou crus surprendre un sourire expirant sur ses lèvres. Un rayon d’espoir et de bonheur illumina mon âme.

— Oh ! je l’aime, je l’aime, lui dis-je. Je sens que je ne puis vivre sans elle. Je n’ai pas dormi depuis qu’elle est malade ; et je mourrais, si sa maladie s’aggravait. — Oh ! dites, dites-moi comment elle se trouve ce matin.

— Tranquillisez vous, M. Meunier, elle est bien mieux ce matin. Elle a eu un peu de fièvre cette nuit, mais ça ne sera rien. Elle pourra se lever cette après-midi. Venez et vous la verrez.

« Je me détournai pour essuyer une larme de joie ; Mme Deguise me vit, et me prenant la main dans les siennes, me dit :

— Mon cher M. Alphonse, je vous estime et vous aime, parceque vous êtes un excellent jeune homme. Madame de Grandpré m’a parlé bien avantageusement de vous ; mais si vous voulez m’en croire, vous renoncerez à un amour inutile, qui ne vous causera que du chagrin, à vous et à Éléonore. Son père ne consentira jamais à vous la donner en mariage.

« Si l’on eut versé du plomb fondu sur mon cœur, on n’en eut pas arrêté plus vite les pulsations ; je me sentis chanceler, et j’eus besoin de m’appuyer