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DEUX DE TROUVÉES

— Ronaldo, cria-t-il à l’homme qui avait été posé en vedette sur le cap, et qui se trouvait à quelques pas de lui, descends vite, avertir nos gens d’arrêter et de demeurer chacun dans la position où il se trouve, la rame au bras. Cours et alerte ! tu remonteras quand je t’en donnerai le signal.

Cabrera, appuyé sur le tronc vermoulu d’un vieux chêne, semblait visiblement contrarié. Pendant quelques instants il suivit avec découragement le Zéphyr, qui fuyait comme une mouette en courant la bouline.

Tout à coup Cabrera se redressa, détacha sa cravate et l’étendit au vent. Un sourire de satisfaction vint agiter ses lèvres ; son front se dérida. La cravate flotta en s’agitant du côté de Matance.

— Enfin, s’écria Cabrera, enfin, je les tiens, ils ne pourront m’échapper cette fois. Le vent a sauté au nord nord-ouest. Le Zéphyr ne peut poursuivre sa route sans virer de bord ; et s’il vire de bord, nous pourrons sortir de l’esterre sans danger. Et alors nous verrons. À moi le Zéphyr, à moi le million, à moi la vengeance !

En effet ce qu’avait prévu Cabrera arriva. Le Zéphyr fut obligé de virer de bord et de courir une bordée en s’éloignant en ligne droite de la pointe aux Cormorans. Cabrera suivit encore quelques instants le Zéphyr, et après s’être assuré que la pointe aux Cormorans masquait complètement la sortie de l’esterre à la vue du Zéphyr, il donna à Ronaldo le signal de remonter et descendit à la hâte. Arrivé sur la plage, il envoya un de ses gens dire à Burnouf de faire sortir, aussitôt qu’il le pourrait, les deux vaisseaux de l’esterre, de ne pas l’attendre, qu’il les