Page:Bouchor - Les Symboles, nouvelle série.djvu/39

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Répondit à Satan : « Peux-tu dire, ô Trompeur,
De cet homme inouï, que la Mort lui fait peur ?
L’aveugle voit ; le sourd est stupéfait d’entendre ;
Des yeux levés au ciel, une parole tendre
Suffisent au puissant rabbi pour les guérir,
Et tu me soutiendras qu’il a peur de mourir !
Je crois qu’il a voulu, Maudit, te prendre au piège,
Et que tu vas bientôt t’écrouler de ton siège
Pour être torturé dans mes abîmes. — Moi ?
Lâche et stupide Enfer, calme un peu ton émoi.
Pour livrer aux bourreaux l’homme qui va paraître,
J’ai suscité parmi ses disciples un traître.
Au cœur du peuple juif — mon peuple — j’ai soufflé
La plus âpre fureur. Mes mains ont affilé
La lance qui devait percer le Fils de l’Homme,
Car c’est ainsi que, plein de lui-même, il se nomme.
J’ai préparé sa croix avec un soin jaloux ;
Pour ses mains et ses pieds, seul, j’ai forgé les clous ;
Et j’ai mêlé moi-même — Enfer, je m’en fais gloire ! —
Le vinaigre et le fiel qu’on lui tendit à boire.
Sa mort est mon ouvrage, entends-tu ? Maintenant,
Tâche de bien garder ce rabbi surprenant,