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CHAPITRE V

LA LITTÉRATURE


Dans quelle mesure, en Inde, les races se sont-elles spécialisées ? Quelles y sont les arêtes du droit ? En quels canaux y coule la vie économique ? Nous avons essayé de répondre à ces diverses questions. Nous avons ainsi commencé à dégager les caractères principaux de la civilisation hindoue ; et sur ces caractères mêmes nous avons relevé les empreintes, plus ou moins nettes selon les cas, du régime spécial qu'elle a supporté pendant des siècles, le régime des castes. Ne pourrions-nous maintenant discerner, jusque sur les produits les plus raffinés de cette civilisation, des marques analogues ? La littérature exprime l'état social, répète-t-on. Entre les formes sociales et les formes littéraires qui ont prédominé en Inde, il est vraisemblable que les rapports ne manquent pas. Il ne serait pas inutile de les mettre en lumière. Nos thèses sur les effets du régime en pourraient recevoir une dernière et frappante confirmation.

Malheureusement ici plus que jamais la tâche nous sera malaisée. Pour saisir les espèces d'effluves subtils qui montent des formes sociales aux formes littéraires, deux conditions, d'abord, semblent également nécessaires : une longue familiarité avec le détail même des œuvres, et une attention constante aux effets, directs ou indirects, des relations des hommes entre eux. La première condition fait le plus souvent défaut au sociologue ; la deuxième aux spécialistes qu'il est obligé de suivre.