Page:Bouglé - La Démocratie devant la science, 1904.djvu/309

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Contre celle-ci nous pouvons maintenir, après expérience, nos conclusions fermes. Nous la connaissons désormais à ses fruits. Et après un si patient examen, nous espérons avoir établi définitivement que tous les traits qu’on lui emprunte pour en accabler les sociétés démocratiques en réalité passent à côté ou au-dessous d’elles : telum imbelle sine ictu

Conclusions négatives encore, dira-t-on ? — Il est vrai que nous n’avons pas démontré directement que les idées égalitaires sont justes, ni même que leur succès est certain. Il semble cependant que nous ayons gagné quelque chose à les soumettre à cette épreuve.

Dans une précédente étude[1], nous avions découvert les raisons profondes de leur omnipotence et fait ressortir l’espèce de nécessité interne qui les impose aux esprits dans notre civilisation. Mais, nécessaires ou non, devait-on nous dire, le fait est qu’il est impossible de réaliser leurs exigences et qu’il est dangereux de le tenter. Écoutez plutôt les leçons de la nature.

C’est cette objection préalable que nous avons levée. Nous avons paralysé, en brisant les équivoques qui étaient ses armes, cet adroit effort pour mettre aux prises les deux grandes forces contemporaines et pour exploiter, contre l’attraction de la démocratie, le prestige de la science.

Nos conclusions, si elles ne sont pas impératives, sont donc au moins émancipatrices. Elles affranchissent nos sociétés de l’obsession naturaliste. Elles leur rappellent que personne n’a le droit de décourager, au nom d’une morale soi-disant scientifique, les ambitions de l’esprit : la voie est libre.


  1. V. l’introd., p. 4, note 1.