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Page:Bouglé - Qu’est-ce que la sociologie ?, 1921.djvu/123

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L’HISTOIRE ET LA SCIENCE SOCIALE

tique. L’affirmation d’une relation causale quelconque implique le sentiment ou la connaissance d’une ou de plusieurs lois naturelles. » En d’autres termes, l’étiologie historique ne saurait se passer des sciences sociales.


Nous pensons donc qu’ici encore Cournot avait procédé par distinctions trop tranchées ; et que, pour retrouver les enseignements les plus féconds de sa doctrine, il faut réunir ce qu’à de certains moments du moins il paraît séparer. Nous avons montré déjà que les sciences historiques ne sont pas, en réalité, séparées par un abîme des sciences théoriques : il y a de l’historique et il y a du théorique dans toutes les sciences du réel. De même il faut dire que dans toute explication, même historique, à côté des faits donnés, les lois supposées entrent en ligne de compte. Dans bien des cas ces lois restent sous-entendues, tantôt parce qu’elles sont trop simples, — et tantôt parce qu’elles sont trop compliquées. Mais à ne formuler jamais les idées générales dont nous usons dans nos explications, à ne pas nous détourner pour les regarder en face et leur demander d’où elles viennent, à nous fier au sens commun et à l’expérience courante, il est clair que nous risquons de rester dans le vague ou de tomber dans l’arbitraire. Il vaut mieux sans doute généraliser consciemment, après des analyses et des comparaisons méthodiques, qu’inconsciemment et comme au hasard.

Si ces réflexions sont exactes, auxquelles nous achemine la méthodologie de Cournot, elle nous aura donc finalement aidés à nous convaincre, non plus seulement de la possibilité, mais de la nécessité d’une organisation des sciences sociales.