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MERLIN L’ENCHANTEUR

— Dites-moi donc, répondit le roi, de par qui vous vous rendez prisonnier et comment vous avez été conquis.

— Sire, j’aime la belle Bianne, fille du roi Clamadieu. Je l’eusse volontiers prise pour femme, car je suis fils de roi et de reine ; mais, ni par prière, ni par amour, ni par prouesse, je n’ai pu gagner son cœur. L’autre soir, je la rencontrai en compagnie du nain contrefait dont elle est l’amie, et je n’ai pas daigné croiser la lance contre lui ; mais il m’a renversé et démis l’épaule, et il ne m’a fait grâce de la vie qu’à la condition de me rendre prisonnier à vous.

— Bel ami, dit le roi, il vous a mis en bonne et douce prison. Mais dites-moi quel est ce chevalier nain ; je vous libérerai à ce prix.

— Sire, c’est le fils du roi Brangore d’Estrangore, qui est haut homme, puissant en terres et en amis, et loyal envers Dieu.

— Certes il est prud’homme, dit Artus, et je m’étonne que Notre Sire lui ait donné un tel héritier.

— Il y a deux ans, cet avorton était la plus belle créature du monde ; le fol Evadean, mon père, me l’a souvent dit. Une demoiselle qu’il ne voulait aimer l’enchanta ; je n’en sais pas plus. Et maintenant, sire, si vous me donnez congé, je m’en irai avec ma honte.