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MERLIN L’ENCHANTEUR

— Sire, qu’y a-t-il ? Venez souper. Ou, au moins, faites-en semblant pour l’amour de mon seigneur votre frère, qui sans vous ne mangerait pas.

— Maître, ne suis-je votre sire, comme à Bohor mon frère, et à Lambègue ? Je vous commande à tous d’aller manger. Pour moi je ne toucherai plus ni pain ni vin avant d’avoir accompli un dessein que j’ai formé et que je ne puis dire.

— En nom Dieu, dit Pharien, je quitterai donc votre service, car puisque vous me cachez votre pensée, c’est que vous avez méfiance de moi.

Et il fit mine d’être courroucé. Mais Lionel, qui l’aimait tendrement, se mit à pleurer.

— Ha, maître, dit-il, ne partez point ! J’ai dessein de mander demain au roi Claudas qu’il nous vienne voir : alors je me vengerai de lui.

— Mais, quand vous l’aurez occis, que ferez vous ?

— Ceux de ce pays, qui sont tous mes hommes, me protégeront selon leur pouvoir ; d’ailleurs, Dieu qui conseille les déconseillés y pourvoira. Et si je meurs pour conquérir mon droit, la mort sera bienvenue, car mieux vaut périr avec honneur que vivre honni et déshérité en ce monde.

— Beau sire, dit Pharien, on ne peut entreprendre une telle chose à la légère. Attendez