Page:Boulenger - Romans de la table ronde I.djvu/63

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
47
L’HOMME SAUVAGE

rêve, c’est votre femme, et les douze louveteaux qui la couvraient, ce sont ses douze pucelles. Faites-les dévêtir : vous verrez si elles sont bâties pour la servir.

L’empereur ébahi ordonna qu’on déshabillât sur-le-champ les demoiselles, et l’on remarqua qu’elles étaient garçons, à qui rien ne manquait. Alors Julius César fut si irrité qu’il demeura un moment sans pouvoir parler. Puis il demanda à ses barons quelle justice devait être faite, et les barons jugèrent que la femme devait être brûlée et les ribauds pendus ; ce qui fut exécuté sur-le-champ.

— Mais dites-moi, fit l’empereur à l’homme sauvage, pourquoi vous avez ri en regardant mon sénéchal, et devant l’abbaye, et quand la reine entra ici ce matin.

— Sire empereur, dit l’homme sauvage, la première fois j’ai ri parce qu’une femme m’avait pris par sa puissance et son adresse quand nul homme ne l’aurait su faire : car Grisandole est la plus belle et la meilleure femme et la plus pucelle de votre terre. La seconde, devant l’abbaye, c’était parce qu’un trésor se trouvait enfoui justement sous les pieds de ceux qui demandaient l’aumône. La troisième, c’était par dépit : car l’emperière qui avait le plus prud’homme de votre royaume se donnait chaque jour à douze ribauds. Mais n’en tenez point rancune aux autres femmes ; elles sont clairse-