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Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/348

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plaie était gangrenée en plusieurs endroits… Dupuytren taillait et tranchait avec le couteau et les ciseaux ; ses pinces d’acier sondaient le fond de la plaie et ramenaient des fibres qu’il tordait et qu’il attachait ensuite. Puis la scie enleva en grinçant des fragments cariés du maxillaire inférieur. Les éponges, pressées à chaque instant, rendaient le sang qui coulait à flots. L’opération dura vingt-cinq minutes. L’abbé ne fronça pas le sourcil, mais il était un peu pâle.

« — Je crois que tout ira bien, lui dit amicalement Dupuytren. Avez-vous beaucoup souffert ?

« — J’ai tâché de penser à autre chose, répondit le prêtre. »

« …Chaque matin, lorsque Dupuytren arrivait, par une étrange infraction à ses habitudes, il passait les premiers lits et commençait la visite par son malade favori. Plus tard, lorsque celui-ci put se lever et faire quelques pas, Dupuytren, la clinique achevée, allait à lui, prenait son bras sous le sien, et harmonisant son pas avec celui du convalescent, faisait avec lui un tour de salle. Pour qui connaissait l’insouciante dureté avec laquelle Dupuytren traitait habituellement ses malades, ce changement était inexplicable. »

Plus inexplicable ou plus admirable, alors que, quelques pages plus haut, l’auteur nous dit : « Poussant jusqu’aux dernières limites ses doctrines de positivisme, Dupuytren s’acharna avec la plus excessive ténacité contre ce qu’il appelait les utopies spéculatives (religieuses), chaque fois qu’il trouva à les combattre sous quelque forme que ce fût. Par degrés son antipathie devint de l’exécration. »