Page:Bourdon - En écoutant Tolstoï.djvu/131

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donnait un « bon lit » ; mais après m’être tourné et retourné dans ce « bon lit » pendant une heure sans avoir pu fermer l’œil, je prenais un parti héroïque : je quittais le « bon lit », et, étendu par terre, sur le tapis, je dormais à poings fermés.

— Eux n’ont même pas de tapis : c’est la planche, et tous les jours, toute leur vie !

— Affaire d’habitude. On n’est pas mal du tout sur une planche.

— Oh ! j’en ai goûté : j’ai fait mon service militaire…

— Mais dites-vous bien que, s’ils y tenaient, ils auraient des lits. Les croyez-vous pauvres au point de ne pouvoir s’acheter ou se fabriquer des matelas ? S’ils s’en passent, c’est qu’ils le préfèrent.

— Certes, opine la comtesse, ils auraient tous des lits, s’ils le voulaient. Tenez, j’avais ici à mon service une très gentille femme de chambre, et qui me faisait de la couture. Elle était très propre, même élégante. Elle avait sa chambre, elle avait un lit. Elle s’est amourachée d’un gars de la campagne et l’a épousé. Eh ! bien, ils ont un lit, mais ils ne