Page:Bourdon - En écoutant Tolstoï.djvu/153

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pondre, il tournait la tête vers moi, et je sentais alors ses yeux flamboyants, ses yeux étranges et prodigieux, dont le foyer s’attise, comme au fond d’une caverne de lumière, derrière la forêt des sourcils, entrer en moi comme des épées. Parfois il regardait devant lui, dans le vague. Ou il se renversait sur sa chaise, tenant sa ceinture ou couvrant sa poitrine de ses vastes mains. Tout en cet homme est singulier et saisissant. Comment des mains peuvent-elles être à ce point révélatrices d’une âme ? Les siennes expriment la puissance, la majesté, la délicatesse. Elles sont longues et larges, avec des plis innombrables, des doigts longs et forts, ronds comme des cylindres, sans renflement aux phalanges, et carrés du bout. Mains immenses, robustes et dominatrices, élégantes cependant, et souples, et qui sont d’un grand seigneur ; et quand il les pose sur sa blouse, on dirait qu’il en veut ceindre sa poitrine.

Il parla de la Russie, du régime russe, des hommes qui le représentent, de l’Empereur, de ses ministres, de « cet homme si fâ-