Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/120

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Mais qu’il était difficile à composer, ce billet ! Il en avait multiplié les brouillons, dans un va-et-vient de mouvements contradictoires, qui lui rappelait les terribles heures passées à Marseille, tant d’années auparavant, à écrire une lettre d’une autre nature, celle après laquelle tout avait été fini entre eux. Il était une heure du matin quand il s’arrêta sur la rédaction suivante, d’une banalité qu’il jugea tout à la fois simple, digne et habile :

Je viens d’apprendre, madame, votre présence à Palerme. S’il m’était possible de vous être de quelque utilité, pour ces premiers jours de votre arrivée dans une ville étrangère, vous savez, n’est-ce pas, que celle qui fut la meilleure amie de ma sœur Julie me trouvera toujours empressé à son service ? Je vous serais infiniment reconnaissant si vous pouviez me fixer l’heure où il me serait permis de me présenter chez vous sans risquer d’être importun.

Et il signa, non sans que sa plume eût hésité une seconde à cet innocent mensonge de politesse : « Votre respectueux… » Fallait-il qu’il eût souffert par elle pour garder cette rancune, après