Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/258

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hallucinante qui l’avait, durant la nuit, harcelée de folles hypothèses. « Ma fille est à moi de par les lois, comme ma maison, comme mon argent. Si cet homme est pris de remords maintenant, tant mieux. Qu’il souffre à son tour, ce n’est que justice. Je n’ai même pas à lui répondre. La vraie réponse c’est d’activer notre déménagement… Si celle-là ne suffit pas, s’il s’acharne à notre poursuite, je lui montrerai qu’il n’a plus devant lui la femme faible d’il y a neuf ans… C’est une mère contre laquelle il lui faudra lutter, et, s’il ne sait pas ce que vaut la volonté d’une mère, je le lui apprendrai… »

Le coup de fouet de cette résolution, où l’intensité de l’amour maternel avait pour auxiliaire les profondes rancunes de la femme autrefois outragée, rendit à la malade cette énergie physique qui lui manquait depuis des jours. Elle voulut, le matin même, aller en personne à la villa Cyané pour constater de ses yeux l’avancement des travaux. Elle eût pu s’y installer dans les vingt-quatre heures, n’était le retard de la fête. Après avoir parlé à l’homme chargé de la garde et lui avoir donné des instructions plus pressantes encore, elle rentra pour recommander aux femmes de chambre qu’elles préparassent les malles aussitôt, afin de n’attendre pas même une matinée de plus, même une heure dans cet hôtel maintenant détesté, quand la villa serait prête. Ni ce jour-là, ni