Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/295

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dans l’intervalle qui avait séparé leur déjeuner et sa rentrée au commun salon, le coup d’une nouvelle inattendue l’avait bouleversé. Cette hypothèse d’un télégramme était si logique, elle cadrait si complètement avec les autres données, que la jeune fille s’y était arrêtée malgré elle. Francis était ressorti pour répondre. Il avait voulu porter lui-même cette réponse au bureau de la via Macqueda. C’était justement dans cette rue que demeurait le professeur Teresi, ce même docteur qui quelques jours auparavant la rassurait sur la santé de son fiancé, avec une bonne humeur si confiante. Et en deux fois quarante-huit heures, sans qu’aucun symptôme nouveau se fût produit, il déclarait que le jeune homme devait quitter Palerme immédiatement ! Était-ce possible cependant qu’une semblable entente eût eu lieu entre deux personnes qu’elle était habituée à tant estimer ? Henriette eut beau se répondre : « Non, » avec l’énergie d’une créature jeune et sincère, pour qui le doute sur une âme humaine quelconque est une douleur et un désespoir le doute sur une âme aimée, elle ne triompha point de cette souveraine évidence du cœur qui lui avait fait se dire à l’entrée de Francis dans le salon : « Il va mentir, » et à sa première phrase : « Il ment. » Lorsqu’elle le retrouva le lendemain, après cette nuit de torturante insomnie, le premier regard qu’ils échangèrent lui renouvela