Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/315

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penchant sur lui pour le regarder, elle aussi, avec la sauvage ardeur que les premières souffrances et l’éveil de la passion avaient allumée dans son être, jusque-là si équilibré, si harmonieux. Une infinie reconnaissance émanait de son visage ému pour la preuve qu’elle recevait et que sa naïveté prenait pour une preuve de tendresse. Puis avec la douceur de cette gratitude dans sa voix et dans son geste :

— « Merci, Francis, mon Francis, » dit-elle enfin. « Ah ! Quel poids vous m’avez enlevé de là. » Et elle montra sa poitrine. « Comme vous êtes bon pour moi ! Comme vous m’aimez ! C’est donc vrai ? Vous n’aviez pas pour me quitter une autre raison que vous ne vouliez pas que je sache ?… Mais vous partirez comme le docteur vous a prescrit de partir, » insista-t-elle en souriant de nouveau, et, avec un rien de coquetterie fière, elle ajouta : « Je ne suis pas une femme si peu courageuse, et du moment que votre santé exige que vous vous en alliez, je me croirais bien lâche de ne pas accepter bravement cette séparation… Vous vous êtes trompé sur moi si vous avez pensé que je vous ai retenu pour vous demander de vous sacrifier à ce qui serait le plus misérable des égoïsmes… Ce n’est pas tant de ce départ que je souffrais. C’était surtout de ne pas en savoir le vrai motif, de croire du moins que je ne le savais pas. C’était surtout de ne pas vous