Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/113

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un gros parapluie bombait sous son bras ; le vent agitait les ailes de sa coiffe blanche, et la croix de son chapelet battait sa robe de bure bleue. Pourquoi René, après avoir reporté sur Rosalie toute la déplaisance de ses sensations bourgeoises, reporta-t-il involontairement sur l’image de madame Moraines le mouvement de rêverie religieuse que ce costume de la sœur de charité produisit en lui ? Les phrases que la belle mondaine lui avait débitées à table, la veille, sur les œuvres pieuses auxquelles prennent part tant de grandes dames jugées frivoles, lui revint à la mémoire. C’était la troisième fois depuis le matin que le visage de cette femme lui apparaissait, et chaque fois plus précis. Mon Dieu ! Si son bon génie voulait qu’il la rencontrât ainsi, dans une rue écartée de Paris, en train de rendre visite à ses pauvres ? … Et au lieu de cela, il s’engageait dans un couloir au bout duquel était une cour, et au fond de cette cour se trouvait la porte du rez-de-chaussée occupé par les Offarel. Poussés par l’exemple des Fresneau, ils avaient, eux aussi, réalisé le rêve secret de toute famille de la petite bourgeoisie parisienne, et déniché dans ce quartier isolé un appartement, avec un jardinet grand comme un mouchoir de poche.

— « Ah ! monsieur René ! … » fit Rosalie qui vint, au coup de sonnette du jeune homme,