Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/140

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titre de High-life, contiennent l’adresse de toutes les personnes attachées de près ou de loin à la vie élégante. Il l’avait pris et il le feuilletait en disant, avec l’embarras de son petit mensonge dans le regard et dans la voix :

— « Tiens ! votre nom n’est pas là, Claude ? »

— « Par exemple, » fit Colette, « je le lui défends bien. Il ne fréquente que trop tous ces gens de cercle… »

— « Je croyais que vous aimiez assez la conversation de ces messieurs, » dit Claude.

— « Fine allusion ! » répliqua-t-elle en haussant ses jolies épaules ; « mais c’est leur affaire à eux d’être chics. Ils savent s’habiller, jouer au tennis, monter à cheval et parler sport, et toi, tu ne seras jamais qu’un gommeux avec une tête de savant… Ah ! si je pouvais te revoir comme il y a huit ans, lorsque je sortais du Conservatoire et que tu m’as été présenté… C’était dans un restaurant au coin de la rue des Saints-Pères ; j’étais venue déjeuner avec ma mère et Farguet, mon professeur… Tu étais si gentil, dans ton coin, avec ton air de sortir d’une cellule et d’ouvrir tes grands yeux sur la vie ! … Tiens, quand nous nous sommes mis ensemble, ç’a été à cause de cela… Vous verra-t-on au théâtre, ce soir ? » ajouta-t-elle comme René se levait, reposant le livre ; il venait d’y trouver ce qu’il cherchait, l’adresse de madame Moraines,