Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/495

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par eux s’accordait si bien avec les secrets remords de Claude, qu’il détourna ses yeux, à lui, et après un silence, il demanda :

— « Est-ce que je peux le voir ? … »

— « Pas aujourd’hui, » répondit Émilie, « il est si faible. Le docteur craint pour lui les émotions. » Et elle ajouta : « Mon oncle va vous dire comment il se trouve… »

— « Et quand est arrivé ce malheur ? Je n’ai rien su que par les journaux. »

— « Les journaux en ont parlé, » fit Émilie, « moi qui avais pris tant de précautions ! »

— « Une petite note de rien… » repartit Claude qui devina la vérité à la subite rougeur de Rosalie. Le vieil Offarel avait, sous ses ordres dans son bureau, à la Guerre, un jeune homme qui s’occupait de littérature et que l’écrivain connaissait un peu. Le sous-chef avait dû parler, et sa fille le savait déjà. Il tenta de s’attirer un regard plus aimable, en égarant les soupçons de madame Fresneau : « Les reporters furètent partout, » disait-il ; « pour peu qu’on soit connu, on ne leur échappe pas… » Et il continua : « Mais les détails ? »

— « Il est rentré avant-hier, » dit Émilie, « vers les quatre heures, et tout de suite j’ai deviné à sa figure qu’il avait quelque chose… Mais quoi ! J’étais si habituée à le voir triste depuis