Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/69

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de lui raconter une nouvelle histoire, avec cette espèce d’énergie animale qui se mélange, dans ces organisations slaves, à la plus fine élégance des manières.

— « J’arrive donc à Paris, il y a huit ans, après la guerre… Tenez, je n’y étais pas venue depuis la première Exposition, en 1855. Ah ! cher monsieur, ce Paris d’alors, ravissant, charmant… et votre empereur… idéal… » — elle appuyait sur les dernières syllabes des mots quand elle voulait marquer son enthousiasme.— « Enfin, ma fille, la princesse Roudine— vous ne la connaissez pas, elle habite Florence toute l’année, — était avec moi. Elle tombe malade, elle a été sauvée par le docteur Louvet, vous savez, ce mince avec un air de mignon de Henri III. Je l’appelle toujours Louvetsky, parce qu’il ne soigne que des Russes. Je ne pouvais pas songer à la transporter loin de Paris… Cet hôtel était à vendre tout meublé, je l’ai acheté… Mais j’ai tout bouleversé. Voyez… C’était le jardin ici… »

Elle montrait à René le grand salon, maintenant, où ils étaient entrés. Il formait une espèce de vaste hall dont les murs disparaissaient sous les toiles de toute grandeur et de toute école, ramassées par la comtesse au cours de ses vagabondages Européens. Si la première impression