Page:Bourget - Une idylle tragique, Plon-Nourrit.djvu/295

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il serrait des papiers d’affaires courantes. Il l’y avait oubliée. Il ne s’était aperçu de sa distraction qu’une fois arrivé en Egypte. Là encore il avait eu l’idée de brûler le portrait ; une seconde fois il n’avait pas pu. Dans le monde cosmopolite où ses fonctions de diplomate l’avaient fait vivre, l’habitude est constante chez les femmes de donner leur photographie avec des signatures à des amis, quelquefois à des connaissances de passage ; par conséquent le prénom d’Ely écrit au bas de la carte ne prouvait rien. Berthe ne découvrirait jamais ce portrait. Si elle le découvrait, il en serait quitte pour dire le nom de Mme de Carlsberg. Il avait donc remis la photographie où elle était ; et un jour, l’événement qu’il avait considéré comme peu probable, s’était produit de la manière la plus simple. Il était absent de l’hôtel. C’était à l’époque de leur halte à Louqsor. Berthe, qui ne cessait pas, durant tout ce voyage, de tenir ses comptes avec sa méticulosité native et apprise, avait, pour chercher une note réglée par son mari, regardé, sans penser à mal, dans les poches du portefeuille. Elle avait trouvé la photographie. Seulement, l’autre partie de la prévision d’Olivier ne s’était pas réalisée. Elle ne l’avait pas questionné. La présence de ce portrait parmi les papiers d’Olivier, la souveraine et singulière beauté de ce visage de femme, la nouveauté de ce prénom étranger, l’élégance de la toilette, le lieu enfin d’où venait la photographie, — Rome, — tout avait dit à la jeune femme que c’était là