Page:Boursault - Théâtre, tome troisième, Compagnie des Libraires, 1746.djvu/507

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Et je vous crois le mien, comme je suis le vôtre.

ESOPE.

Pour en obliger un, faut-il en perdre un autre ?
Il n’est rien de si beau que d’être généreux.
Vous auriez du scrupule à faire un malheureux.

CLEON.

Bon ! C’est bien à la Cour que l’on a du scrupule ?
On cherche à s’avancer, sans voir qui l’on recule.
Il n’est point de moment où l’on ne soit au guet
Pour y mettre à profit les faux pas qu’on y fait.
Et pourvû qu’à son but un Courtisan arrive,
On l’applaudit toujours quelque route qu’il suive :
Aller à la Fortune est mon unique fin.

ESOPE.

Allez-y, croyez-moi, par un autre chemin.
Crésus, des Potentats l’un des plus équitables,
A qui depuis un an, j’ai dédié mes Fables,
Se fait lire avec soin le matin & le soir,
Celles que sans foiblesse un grand Roy peut sçavoir.
Et le plus lâche crime étant la calomnie,