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la terreur en macédoine

le nombre, et que la résistance de quelques braves épouvante.

Ils s’arrêtent, se regardent, s’effarent et tournent les talons en hurlant ces mots qui seraient d’un comique irrésistible en toute autre circonstance :

« À l’aide !… à l’aide !… on massacre nos frères ! »

Les autres ont entendu les détonations qui dominent le bruit de tuerie. Ils voient le groupe qui s’enfuit affolé, ils entendent les cris de détresse et, naturellement, se joignent aux fuyards en raison de cette contagion irraisonnée de la peur.

« C’est ça ! reprend la voix, allez-vous-en ! C’est plus sage et plus prudent… n’est-ce pas, Michel ?

— Oui, chef ! plus prudent… mais c’est bien amusant tout de même, de taper dans le tas… »

Mais le groupe n’entend pas ces derniers mots qui se terminent par de gros rires pleins d’ironie. Il s’éloigne, grossi de gens qui se sauvent sans savoir pourquoi, et s’en vont buter dans un géant qui, le sabre nu, barre la route.

C’est Marko ! Le terrible Albanais voit et surveille tout. Il comprend d’emblée la cause de cette défaillance.

« Halte ! crie-t-il en faisant du sabre un moulinet aux flamboyants éclairs d’acier.

« Halte ! vous dis-je !… le premier qui passe est mort ! »

Les fuyards n’osent plus battre en retraite et s’écrient :

« On nous tue !… mais on nous tue, là-bas !

— Eh bien ! oui… je sais… on résiste un peu…

« Mais, que diable ! on ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs !