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XIVe siècle. Mitigations refusées.

aussitôt le Souverain Pontife, sans même le laisser parler, ah ! Père Dom Jean, vous ne sauriez croire à quel point j’aime votre Ordre, et c’est pour cela que je lui ai rédigé de nouveaux Statuts ; vous en avez déjà connaissance, je suppose. — Oui, Très Saint-Père, répondit humblement le Prieur d’Avignon, je le sais, mais daignez me permettre de vous le dire : ces nouvelles Règles, loin de nous être utiles, ne tendent à rien moins qu’à détruire notre Ordre, puisque vous nous forcez de transgresser les lois de nos ancêtres. — Ces paroles frappèrent Urbain d’étonnement ; sans s’arrêter, Dom Jean de la Neuville continua : « Si le Prieur de la Grande Chartreuse est Abbé, il doit tenir un rang en rapport avec sa dignité, mais les revenus de cette maison sont si minimes, qu’ils n’y suffiront même pas, et alors comment faire face aux autres dépenses indispensables pour l’entretien de la Communauté ? Si nous sommes obligés d’aller tous les jours au réfectoire pour prendre nos repas en commun, bientôt on introduira des changements dans la nourriture. S’il faut chanter tout l’office au chœur, notre solitude disparaît en grande partie, car nous serons sans cesse hors de nos cellules, allant, venant dans le cloître, et la solitude, c’est notre vie, notre but par excellence ; au milieu de ce va-et-vient, qu’il sera difficile de méditer, de contempler, et cependant la contemplation n’est-ce point ce qui nous distingue des autres religieux ? Enfin, si l’on accorde aux malades l’usage des aliments gras, n’est-il pas à craindre que plusieurs ne se croient trop facilement malades et que, s’ils le sont en réalité, ils