Page:Boutroux - Pascal.djvu/124

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’en fournissent point, parce qu’il leur est plus aisé de trouver des moines que des raisons. Ce sont des politiques, des habiles, des hommes d’expédients. Ils se sont dit qu’une censure, même surprise, aurait son effet sur la masse ignorante. En fait, la proposition en question n’est hérétique que chez M. Arnauld. Ce qui est catholique chez les Pères, est hérétique chez M. Arnauld. Voilà une hérésie d’une nouvelle espèce ce n’est pas l’opinion qui la constitue, c’est la personne. Pures disputes de théologiens ! En quoi nous touchent-elles, nous qui ne sommes pas des docteurs ?

Jusqu’ici l’attitude de Pascal n’a été que défensive. Il voulait ramener les nouveaux thomistes. Maintenant il va prendre l’offensive et pour atteindre le mal dans sa source, c’est aux jésuites qu’il va s’attaquer. La quatrième lettre touche déjà au point capital les jésuites cherchent les moyens d’innocenter le pécheur.

Que faut-il, demande Montalte à un Père jésuite, pour qu’une action nous soit imputée à péché ? — Il faut que Dieu nous donne, avant que nous ne le commettions : 1o la connaissance du mal qui s’y trouve, 2o une inspiration nous excitant à l’éviter. — Mais ceux qu’on appelle pécheurs sont précisément des hommes en qui ces deux conditions ne sont pas réalisées ; car si elles l’étaient, le péché serait impossible. Il n’y aura donc plus de péché dans la vie réelle, et c’est à bon droit que l’on crie, en voyant passer le Père Bauny : Ecce qui tollit peccata mundi.

Nous soutenons, quant à nous, reprend le Père jésuite, que ces conditions sont toujours réalisées.