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naître en deux croquis… Enfin, notre Claude arrive à Rome le jour de la Saint-Luc, fête des peintres, c’est-à-dire le 18 octobre 1627, et — détail que nous ne saurions exiger de l’imagination de Baldinucci — deux siècles avant les premiers pas de notre Corot, son héritier, sur cette terre promise !


IV

comment le mitron devint peintre

Voilà le roman. Voici la vérité : Sandrart est plus émouvant dans son laconisme. Il nous dit simplement :

Claudius Gillius (Gilli dans le texte allemand et sur le portrait qui l’accompagne) portait le nom de sa patrie (a patria cognominatus). D’un point de départ assez humble et sans instruction (e tenui satis principio et scientia valde mediocri), il parvint dans la peinture à une telle gloire que sa renommée a parcouru l’univers. Comme il n’apprend rien à l’école, ses parents le mettent en apprentissage chez un « boulanger de pâtés » (pistori artocreatum — et remarquez l’amusante coquille d’un traducteur préoccupé de peinture, écrivant pictori pour pistori !). Quand il sait son état, il part pour Rome avec une troupe de cuisiniers et de pâtissiers lorrains, aussi nombreux que réputés là-bas. Ne sachant ni l’italien ni l’usage, il végète sans place, lorsqu’un peintre ingénieux, podagre et de belle humeur le prend à son service : décorateur des conclaves et contraint par nombre d’affaires à