Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/107

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chantés d’une voix forte, faisoient un bruit effroyable : les prélats, qui avoient passé une partie de la nuit à table, en étant éveillés trop matin, obtinrent qu’on arrêteroit ceux qui étoient dans leurs quartiers, & qu’on les conduiroit prisonniers au château de Vincennes. Il s’y en trouva près de trois cent. Juge le beau carillon qu’ils devoient faire, lorsqu’ils commençoient leurs entrechats. Quelques-uns ennuyés d’être renfermés, promirent de renoncer entiérement à la danse & à la musique ; & on leur rendit la liberté. Les autres ont été retenus, & ont continué leurs exercices. Il en est encore outre ceux-là, plus de deux mille à Paris, qui n’ont point été arrêtés.

Avoue, mon cher Brito, que ceux qui trompent ainsi ce peuple facile a séduire, méritent des peines rigoureuses. J’admire la clémence du roi de France : de pareils fauteurs à Constantinople eussent bientôt été empalés : on les eût mis dans un état à ne plus cabrioler. Il semble que ce soit le sort du peuple d’être sans cesse la dupe des imaginations des esprits turbulens. Il donne dans tous les pieges qu’on lui tend, & ne sort des uns, que pour retomber dans les autres.

Un de mes amis m’a raconté une plaisante