Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/316

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leur eût fait connoître les fautes qu’ils commettoient. Mais les favoris & les courtisans, toujours plus attentifs à la fortune qu’à la gloire de leur maître, ne le garantissent point des égaremens dans lesquels ils le voient se plonger. On regarde à la cour les conseils & les avis d’une amitié sincere envers le souverain, comme un rude & périlleux essai.

Si les princes connoissoient combien leurs droits légitimes sont bornés, ils regarderoient leur rang comme un état plus pénible que gracieux, & plus brillant que solide. S’ils sont les premiers juges de leurs sujets, ils en sont aussi les peres. Voilà les titres de leur institution. Quel pouvoir leur donnent-ils, à quel devoir les engagent-ils ? Comme juges, ils doivent sans cesse veiller à faire observer les loix dont ils sont les dépositaires, & auxquelles ils doivent être eux-mêmes inviolablement attachés. Comme peres, ils sont obligés de veiller aux besoins de leur peuple, de prévenir leurs nécessités, de les assister, de ménager leur vie, de ne point les sacrifier à la folle ambition de faire des conquêtes, &c.

Si l’on réfléchissoit sérieusement sur la foiblesse des hommes, on s’étonneroit qu’il y en eût qui se figurassent être dignes de commander aux autres. Ce fut dans sa colere