Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/331

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les maîtres d’ordonner de ceux qui doivent être admis à jouir de sa vue.

Il est des nazaréens qui n’ont point voulu se soumettre à cette croyance. Ils ont soutenu qu’après la mort, Dieu décidoit dans un instant de notre sort. Les moines se sont élevés contre eux : ils les ont déclaré séparés de leur communion ; & ils leur eussent plutôt passé de nier qu’il y avoit un enfer, que de se déchaîner contre ce prétendu purgatoire. L’enfer, en effet, est fort inutile aux prêtres. Quand un homme est damné, il n’a plus besoin de prieres : les oraisons, les chandelles, les aumônes, tout cela ne change rien à son sort. Mais quand il est en purgatoire, pour peu que ses héritiers soient riches, ils n’en sont pas quittes à fort bon marché : il lui faut plus de cinq quintaux de cire, des aumônes pour bâtir la chapelle de quelque saint ancien ou nouveau, des prieres chantées à grands chœurs, &c.

Lorsqu’une âme, condamnée au feu expiatoire rend considérablement, les moines se gardent bien de la délivrer tout-à-coup. C’est une bonne pratique qu’ils perdroient. Ils la soulagent seulement quelque peu : ils rendent le feu qui la nétoie moins ardent ; ordonnent à leurs forgerons de donner la dose de chaleur plus ou moins forte, selon qu’ils