Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/360

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dit, entendu parler toute ma vie de cabalistes ; & quelque recherche que j’aie faite pour en connoître quelqu’un, il m’a été impossible ! J’ai parlé à bien des gens que le public croyoit exceller dans cette science, ils m’ont tous avoué qu’ils n’étoient point fâchés qu’on leur crût ce talent, par l’intérêt & le profit qu’ils en retiroient ; mais qu’au vrai, tout leur savoir se réduisoit, ainsi que le mien, à quelques compositions chymiques, dont les effets étoient connus de peu de gens.

J’ai eu, mon cher Brito, autant de soin de m’instruire de la vérité de la cabale, que ce Juif Vénitien. J’ai trouvé aussi peu de réalité que lui dans tous les contes qu’on en débite avec une ferme assurance. La bonne philosophie m’avoit déja convaincu que la science de lire dans l’avenir étoit réservée à Dieu seul ; il ne me restoit d’incertitude que sur le prétendu pouvoir qu’on donne aux cabalistes sur certains génies toujours prêts à leur obéir.

J’ai examiné en vertu de quoi les sectateurs de la cabale s’attribuoient cette puissance sur les esprits. J’ai trouvé leurs raisons si foibles & si pitoyables, que j’ai placé leur art au rang de l’astrologie judiciaire.

Peut-on pousser le ridicule plus loin que de prétendre que par l’arrangement de certaines lettres,